L’Hebdo varois n° 22–2016

Le jour­na­liste et écri­vain Jean Sévillia don­nait une confé­rence ce mar­di 6 décembre 2016 à Toulon. À l’invitation du Cercle Saint-Exupéry, qui tient depuis trois ans main­te­nant un rythme tri­mes­triel de réunions de haute volée intel­lec­tuelle dans la capi­tale varoise. Avec à chaque fois un inter­ve­nant de car­rure natio­nale. Le thème sélec­tion­né était le ter­ro­risme intel­lec­tuel, sujet par­ti­cu­liè­re­ment maî­tri­sé par l’orateur, qui a pas­sion­né une assis­tance très four­nie. Var Provence/​Nice Provence Info revien­dra sur cet évé­ne­ment. En prio­ri­té, nous avons choi­si de vous livrer les réponses que Jean Sévillia a bien vou­lu nous don­ner lors de l’interview qu’il nous a accordée.

Var Provence : Jean Sévillia, depuis les années 90 vous avez iden­ti­fié, démon­té, dénon­cé le ter­ro­risme intel­lec­tuel. Dans les années 70, la Nouvelle Droite avait inau­gu­ré cette voie. Aujourd’hui, dans les années 2010, vous repre­nez votre bâton de pèle­rin pour une nou­velle croi­sade. Or le ter­ro­risme intel­lec­tuel semble se por­ter mieux que jamais. Pourquoi ?

Jean Sévillia Terrorisme intellectuelJean Sévillia : en réa­li­té le ter­ro­risme intel­lec­tuel a recu­lé sur cer­tains points. Il s’est déve­lop­pé une pen­sée conser­va­toire, « conser­va­trice », forte. Mais c’est vrai, le sys­tème se défend. Il se défend bien en par­ti­cu­lier quand il se concentre sur ses bas­tions tra­di­tion­nels, comme l’éducation natio­nale et les médias, qui consti­tuent les places fortes conser­va­trices, au mau­vais sens du terme, de l’idéologie dominante.

Var Provence : ce com­bat renou­ve­lé est-il le témoi­gnage d’un échec ? Autrement dit : que faire concrè­te­ment contre le ter­ro­risme intellectuel ?

Jean Sévillia : non, ce n’est pas un échec. Nos idées ont pro­gres­sé. Le diag­nos­tic est fait. C’est une base impor­tante. Intellectuellement, nous avons avan­cé. Après, c’est à cha­cun d’agir, là où il est, comme il le peut, au sein de la socié­té. Vous savez, ce sont des com­bats de longue haleine. Les phi­lo­sophes du XVIIIème siècle ont mis soixante ans pour faire péné­trer leurs idées dans la socié­té fran­çaise. C’est long aus­si pour nous.

Var Provence : quel rôle voyez-vous dans cette lutte contre le ter­ro­risme intel­lec­tuel pour ce qu’on appelle la réin­for­ma­tion ou la réinfosphère ?

Jean Sévillia : la place de la réin­fo­sphère est impor­tante. C’est elle qui offre un espace de liber­té pour des voix dis­si­dentes. Mais la réin­for­ma­tion est confron­tée à un pro­blème de finan­ce­ment, qui ne doit pas empê­cher qu’elle res­pecte les prin­cipes de base. Une info doit être véri­fiée, elle doit faire l’objet d’une enquête. La réin­fo­sphère doit faire ce tra­vail sur elle-même, ne pas se conten­ter de slo­gans face à la presse du sys­tème. Je dis sou­vent que je ne prends pas l’information de la presse pour argent comp­tant. Je ne prends pas non plus la réin­for­ma­tion sys­té­ma­ti­que­ment pour argent comptant.

Var Provence : mer­ci Jean Sévillia.

Propos recueillis par Marc FRANÇOIS, Toulon, 6 décembre 2016