Cogolin, 24 avril 2016

Les 16 et 17 avril a été organisée une fête médiévale à Cogolin. Malgré les inévitables embûches qui guettent toujours la première réalisation d’un événement, c’est une honnête et sympathique réussite. Le public est venu en famille se plonger dans l’univers médiéval, qui fascine de plus en plus. Et demeure au fond méconnu, victime des clichés.

Il n’a pas fait grand beau temps le week-end des 16 et 17 avril 2016 dans le Var. Mais du moins pas d’intempéries. Et même de beaux rayons de soleil le dimanche. Une tem­pé­ra­ture douce, qui incite à la bal­lade. Et pour­quoi ne pas allier plai­sir ludique et pré­texte cultu­rel ? De nom­breux varois se sont lais­sé séduire, ils ont déci­dé d’essuyer les plâtres de ces pre­mières médié­vales, mon­tées en par­te­na­riat avec la com­man­de­rie Sainte-Marie-Madeleine de Cogolin.

Un début prometteur

Visiblement le par­ti pris était celui de la fami­lia­ri­sa­tion avec le monde du Moyen-âge, pas celui du spec­ta­cu­laire au sens clin­quant ou com­mer­cial du terme. De ce point de vue l’objectif a été atteint. Grâce à la diver­si­té des stands et des ani­ma­tions, à la qua­li­té des ani­ma­tions aus­si. Le tout en sim­pli­ci­té mais avec rigueur. Les stands étaient variés, de la cal­li­gra­phie au jeu d’adresse, des bijoux aux armes, du fer­rage de che­vaux au tir à l’arbalète. Plusieurs acti­vi­tés étaient conçues spé­ci­fi­que­ment pour les enfants et les ado­les­cents, qui pou­vaient le cas échéant s’essayer eux-mêmes aux arts et tech­niques pré­sen­tés. En réel. Tout de même plus intel­li­gent et for­ma­teur que l’énième jeu vir­tuel sur console ou inter­net. Le lien avec les racines en plus.

On pou­vait ripailler sur place, avec les mets et les breu­vages moyen­âgeux le cas échéant. Damoiseaux et gentes dames ne s’en sont point pri­vés. Gens d’armes pou­vaient poser quelques ins­tants masses, fléaux, et autres per­tui­sanes ou hallebardes.

Une animation réduite mais de qualité

On ne cite­ra pas toutes les ini­tia­tives, on pren­dra seule­ment deux exemples. Les blancs che­va­liers de la com­man­de­rie tem­plière de Biot pour com­men­cer. Forts d’une pré­sence impo­sante, par l’impressionnant camp de tentes et par le nombre de per­son­nages pré­sents. Cette troupe reven­dique des ori­gines remon­tant à l’an 1209, date à laquelle la Milice du Temple reçoit du Comte de Provence tous les droits qu’il détient sur la ville. Un siècle plus tard, en 1308 pré­ci­sé­ment, les tem­pliers dis­pa­raissent pour plus de 700 ans, au bout des­quels la flamme est rani­mée autour des années 2009 à 2011. Le but de l’association est aujourd’hui essen­tiel­le­ment de faire connaître au public le plus large la vie des ordres de che­va­le­rie au Moyen-âge. En alliant culture, tra­di­tion et péda­go­gie. Ils – et elles – le font, et le font bien. Ils redonnent vie aux ordres en expli­quant la che­va­le­rie, des vête­ments aux cam­pe­ments et objets de la vie quo­ti­dienne, des armes aux combats.

Les Goliards, quant à eux ont effec­tué une pres­ta­tion dans un tout autre registre : ils ont déam­bu­lé dans les allées, atti­rant l’attention, s’arrêtant de temps à autre, fai­sant un peu de théâtre ambu­lant, racon­tant des his­toires, fai­sant des cau­se­ries, jouant de la musique. Ils se pré­sentent eux-mêmes comme « fai­seurs de dan­se­ries », mais pos­sèdent un registre artis­tique à la fois large et simple, emprunt de proxi­mi­té avec les spec­ta­teurs. Le tout dans la bonne humeur. On s’instruit en se dis­trayant. Les Goliards assument par­fai­te­ment l’étymologie, ce sont de vrais clercs iti­né­rants, mêlant poé­sie, satire et chan­sons à boire.

Des points à améliorer, une concurrence à défier

Certes le rodage devra arran­ger à l’avenir les petites imper­fec­tions de la pre­mière. Une signa­lé­tique vrai­ment mini­ma­liste pour se diri­ger vers le lieu de la fête. Aucune indi­ca­tion per­met­tant de se rendre compte que l’on est arri­vé sur place : il faut devi­ner que ça se passe der­rière le poste de Police, l’entrée du par­king étant fer­mée. Car c’est là que la bât blesse le plus, l’événement a été mon­té sur une place sans âme, entou­rée d’une archi­tec­ture quel­conque. Rien dans l’environnement ne rap­pe­lant, de près ni de loin, l’atmosphère médié­vale. Les ana­chro­nismes n’en étaient que plus saillants.

Le plus grand dan­ger pour Cogolin, der­nière com­mune arri­vée sur ce « mar­ché » flo­ris­sant des médié­vales, demeure tou­te­fois l’encombrement de l’offre. Bien sûr il n’y a pas à pro­pre­ment par­ler embar­ras du choix puisque les dates sont dif­fé­rentes. Cependant entre Brignoles, Bormes-les-Mimosas, Vidauban et Les Arcs-sur-Argens, pour ne par­ler que du centre et de l’est du Var, il existe déjà plé­thore de mani­fes­ta­tions à thé­ma­tique, réson­nance ou car­ré­ment domi­nante moyen­âgeuse. Le nombre de week-ends n’est pas exten­sible, les familles risquent de se las­ser. Souhaitons à Cogolin ori­gi­na­li­té et renou­vel­le­ment pour trou­ver sa place dans notre pay­sage et s’inscrire dans notre histoire.

François Lebourg