La politique pour soi et la politique pour les autres

La mort brutale du maire de Signes nous plonge dans la révolte

La dis­pa­ri­tion de Jean-Mathieu Michel, maire de Signes (com­mune de 2800 habi­tants dans le Var, illus­tra­tion ci-des­sus), depuis mars 1983 (36 ans de man­dat, toute une vie) nous montre bien qu’il y a en France deux voies pour exer­cer un man­dat :
faire de la poli­tique pour soi, ou bien
faire de la poli­tique pour les autres.

GirouetteTandis que nos élites poli­tiques natio­nales et régio­nales mènent une car­rière ambi­tieuse et oppor­tu­niste, au gré des vents, pas­sant d’un cou­rant à un autre pour mieux se faire por­ter plus haut, des maires de petites com­munes font leur devoir au ser­vice de leur conci­toyens, bien sou­vent sans éti­quette poli­tique mal­gré les pres­sions d’un camp ou d’un autre.
Les exemples de tra­hi­son des élites sont si nom­breux que l’on cherche déses­pé­ré­ment une per­son­na­li­té hon­nête et fidèle.
Lisez les car­rières de « ceux qui ont réus­si ». Macron bien sûr, celui qui a le mieux réus­si, qui est ni de droite, ni de gauche, mais de droite ET de gauche, mais par contre farou­che­ment anti-patriote. Ou encore tous ses ministres, tous ses dépu­tés, pas­sés aux Verts, de droite à gauche ou de gauche à droite, peu importe. Relisez la car­rière de François de Rugy. Plus près de chez nous, celle de Christian Estrosi qui se demande s’il faut ou pas se pré­sen­ter avec l’é­ti­quette En Marche ! pour un nou­veau man­dat à la mai­rie de Nice après avoir expri­mé ses sym­pa­thies à l’é­gard du Front National, il est vrai quand il était jeune.
Jean-Mathieu Michel, maire de Signes pen­dant 36 ans, n’a­vait cure de ces jeux poli­ti­ciens avides. Du reste il ne vivait pas de ses maigres émo­lu­ments de maire mais de son métier qu’il exer­çait par ailleurs. Pour Macron, Jean-Mathieu Michel n’ap­par­te­nait pas à ceux qui ont réus­si. Du reste Macron mépri­sait tous ces petits maires de France (lire Macron et les maires : pour­quoi ça coince).

Buffet homardsÀ l’ins­tar du maire de Signes, tous ces « petits » maires n’ont pas « réus­si » puisque toute notre classe diri­geante fait de la poli­tique pour s’en­ri­chir. Pour nos diri­geants, réus­sir, c’est s’en­ri­chir. Les exemples les plus récents ? François de Rugy (encore lui) et ses repas fas­tueux qui a encore le tou­pet d’at­ta­quer Médiapart en dif­fa­ma­tion. Ou plus récem­ment encore le dépu­té Mustapha Laabid (LREM) condam­né à six mois de pri­son avec sur­sis et trois ans d’i­né­li­gi­bi­li­té pour abus de confiance. Fallait-il que ce fût si grave pour qu’il soit condam­né ! Nous n’é­vo­quons ici que les cas les plus récents qui émergent de la cor­rup­tion généralisée.

Le maire de Signes était un homme de ter­rain et il est mort sur le ter­rain, en ser­vice. Tout le contraire de nos poli­ti­ciens hors sol, qui sont sou­vent para­chu­tés au gré des vil­lé­gia­tures à occu­per. Jean-Mathieu Michel par­cou­rait les petits che­mins de son vil­lage qu’il ché­ris­sait pour qu’il reste propre, sans souillure, sans dégra­da­tion. Imagine-t-on nos poli­ti­ciens par­cou­rir les méandres de l’Administration pour la rendre plus proche, plus effi­cace en extir­pant les pique-assiettes et les écor­ni­fleurs ? Alors même qu’ils sont les maîtres en la matière ! Imagine-t-on Toubon à 30000 euros par mois se pré­oc­cu­per de la flui­di­té du fonc­tion­ne­ment de l’État ? Imagine-t-on tous ces anciens élus dénon­cer leur propre fro­mage parasitaire ?

Régis Debray Éloge des frontièresDans ces cir­cons­tances hon­teuses pour notre caste diri­geante, notre Président a l’ou­tre­cui­dance de se pro­non­cer en ces mots dans un com­mu­ni­qué d’une inso­lente tar­tuf­fe­rie : « Les der­niers gestes [du maire Jean Michel] tra­duisent le sou­ci de son ter­ri­toire et son impli­ca­tion à faire res­pec­ter la loi pour le bien de tous. »
« Le sou­ci de son ter­ri­toire » ? Mais que fait le Président pour défendre notre ter­ri­toire ? Il l’ouvre à tout vent, fait cher­cher par cen­taines les émi­grés clan­des­tins sur les côtes libyennes, signe le Pacte de Marrakech, brade notre indus­trie et nos équi­pe­ments aux capi­taux pri­vés étran­gers. Les maires devraient défendre leur ter­ri­toire et lui, bra­der le sien, le nôtre ? Là nous sommes en pleine igno­mi­nie.
« Faire res­pec­ter la loi pour le bien de tous », l’i­gno­mi­nie conti­nue. Macron qui veut faire res­pec­ter la loi pour le bien de tous ? Faut-il en rire ou en pleu­rer ? On parle de Benalla ? De la Justice bien­veillante pour les uns et impi­toyable pour les autres !

Massimo Luce